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Quel avenir pour le sous-titrage ?

Télévision

Le sous-titrage en direct est amené à se développer rapidement dans les mois qui viennent mais aucun style, aucune technique n’est encore clairement arrêté. En l’absence d’une mobilisation des utilisateurs du télétexte, les chaînes seront livrées à elles-mêmes pour définir les normes de cette forme relativement neuve de sous-titrage. Elles devront notamment trancher seules une question fondamentale, particulière au sous-titrage en direct : faut-il que les sous-titres soient exempts de fautes de français, ou doivent-ils transmettre un maximum d’informations ?

La question du sous-titrage en direct reste floue, tant pour les spectateurs que pour les chaînes

La loi de 2005 sur l’égalité des chances stipule que les grandes chaînes doivent mettre en place le sous-titrage de l’ensemble de leurs programmes pour l’année 2010. Alors que l’échéance approche et que les volumes de sous-titrage augmentent régulièrement, il reste un certain nombre de zones d’ombre sur la mise en place du dispositif.
La plus vaste concerne le sous-titrage des programmes en direct, que les chaînes préfèrent souvent garder pour la fin compte tenu de difficultés spécifiques : plus cher, il est aussi plus compliqué à mettre en œuvre. Des contraintes techniques obligent par exemple les télévisions à fournir à l’avance des informations sur ces programmes aux laboratoires, à établir des connexions entre leurs régies de diffusion et les bureaux des sous-titreurs, etc. A l’heure actuelle, s’il est compliqué de citer des chiffres très fiables en la matière, on peu estimer que sur l’ensemble des chaînes qui ont des obligations en matière de sous-titrage, moins d’un quart des programmes diffusés en direct sont accessibles aux déficients auditifs.

Repoussée par les chaînes qui temporisent, la problématique du sous-titrage en direct est également absente du débat public. Conséquence, il n’existe pas de conventions ou de recommandations pour ce sous-titrage, comme il peut en exister pour le sous-titrage de programmes en différé (films, émissions enregistrées, etc.). Il existe même des techniques très différentes de sous-titrage en direct, qui offrent des résultats très variés à la fois sur le plan visuel et en terme de qualité.

Des techniques différentes et parfois inadaptées
On a pu par exemple s’en rendre compte le 5 février dernier, lors de l’émission exceptionnelle « Face à la crise », où le Président de la République était interviewé en direct simultanément sur TF1, France 2 et M6, et où les trois chaînes avaient utilisé un dispositif de sous-titrage différent, certains totalement inadaptés.
Sur France 2, par exemple, une équipe de sous-titreurs munis de simples claviers AZERTY étaient chargés de retranscrire le plus rapidement possible les propos du chef de l’Etat. Les sous-titres apparaissent à l’écran en blocs, sur deux lignes, comme pour le sous-titrage en différé. Lente et compliquée à gérer en direct, c’est la méthode la moins adaptée au débit de parole des talk-shows : fautes nombreuses, sous-titres qui disparaissent avant qu’il soit possible de les lire entièrement, décalage entre le son et l’image, coupes sombres dans les propos des intervenants, il est très difficile de s’y retrouver dans le programme, tant les sous-titres sont lapidaires et anarchiques.
Une comparaison du texte des sous-titres avec une transcription mot pour mot de l’émission révèle ainsi que seul un tiers des informations contenues dans le programme ont été transmises dans les sous-titres.

Les dispositifs utilisés par M6 et TF1, plus adaptés au sous-titrage en direct, reposaient quant à eux sur l’usage de la technologie de la reconnaissance vocale, qu’on appelle généralement sous-titrage vocal : un sous-titreur répète ce qu’il entend dans un micro, et ce qu’il dit est retranscrit sous forme de texte par un logiciel spécialisé. C’est ce texte qui sert à faire les sous-titres, qui défilent alors mot à mot à l’écran, de gauche à droite. La technique permet une retranscription plus complète et un sous-titrage plus rapide et adapté aux émissions en direct. Le résultat obtenu était d’ailleurs nettement supérieur à France 2, tant sur le plan orthographique que sur le plan contextuel : sur la première chaîne, plus de la moitié de l’ensemble des éléments d’informations étaient retranscrits et sur M6, presque les trois quart. Il est évident que la méthode est plus efficace et il paraît déjà certain qu’elle sera la plus largement utilisée. Mais là encore, la question est complexe il il existe différentes approches du sous-titrage.

Entre correction de la langue et transmission de l’information, quelle mission pour le sous-titrage ?
La reconnaissance vocale n’est pas un outil infaillible. Les difficultés spécifiques à la langue française, comme les cas fréquents d’homophonie, impliquent qu’un certain nombre de fautes d’orthographe et de grammaire soient présentes dans les transcriptions, et donc dans les sous-titres. Par exemple, les prononciations des mots marcher, marché, marchés, marchaient, marchaient, marchai sont identiques ou, au moins, très proches.

Rien ne permet encore aux logiciels utilisés pour le sous-titrage de les différencier. Malgré les progrès techniques réalisés et l’expérience grandissante des laboratoires de sous-titrage, il est toujours inévitable que des erreurs apparaissent à l’écran.
C’est la raison pour laquelle les chaînes, soucieuses de leur image, restent frileuses sur l’usage du sous-titrage vocal et préfèrent le plus souvent adjoindre au sous-titreur chargé de la transcription une seconde personne, chargée de corriger le texte et d’envoyer ensuite manuellement les sous-titres nettoyés à l’antenne.

Sous-titrage avec correcteur
C’est le cas, par exemple, pour le sous titrage de l’émission « Ce soir ou jamais », en direct le soir sur France 3. La méthode permet le plus souvent d’obtenir des sous-titres très propres, sans faute ou presque. Il reste en moyenne moins d’une erreur tous les 200 mots. Mais le procédé allonge considérablement le temps de traitement des sous-titres, qui apparaissent à l’écran avec beaucoup de retard. Le délai moyen entre le moment où un mot est prononcé et le moment où il apparait sur la TV est de 10 secondes, avec des pointes fréquentes au-delà de 20 secondes. Ce délai présente deux inconvénients majeurs. D’abord, il brise la cohérence entre l’image et ce qui est dit. L’usager du sous-titrage ne sait plus, par exemple, qui parle, et perd le contexte visuel au moment de la déclaration : informations à l’écran, bandeaux, attitude de la personne qui parle, gestes, réactions du public, etc. Il perd donc beaucoup tous les niveaux de sens associés à l’image. Mais surtout, le retard accumulé sur l’image oblige les sous-titreurs à couper régulièrement et dans l’urgence de grandes parties de ce qui est dit, et l’usager du télétexte se voit privé de pans entiers de certaines interventions, qui sont pour ainsi dire censurées. Ce processus peut également mener à des situations où les informations sont déformées et à des contresens. Au final, le sous-titrage est en français correct mais ne transmet pas la totalité de l’information.

Sous-titrage sans correcteur
Dans le sous-titrage vocal sans correcteur, la transcription issue de la reconnaissance vocale est diffusée tel quel, sans filet de sécurité. La méthode réduit nettement le délai d’apparition des sous-titres, qui reste en moyenne en dessous des 5 secondes. Le fait de se passer de correcteur assure la simultanéité entre les images et les sous-titres. Elle autorise donc le sous-titrage à suivre le rythme du programme et le débit de parole des intervenants. Il est alors inutile de supprimer arbitrairement des interventions et les utilisateurs du sous-titrage profitent de la quasi-totalité des informations.
En contrepartie, les sous-titres peuvent contenir un nombre plus élevé de fautes, avec une moyenne de l’ordre 4 erreurs pour 100 mots (soit une exactitude de 97%). S’il peut arriver qu’elles rendent des phrases difficiles à lire, la très grande majorité des erreurs n’entravent pas la compréhension. Ce sont le plus souvent des fautes d’accord ou de brefs mots en trop (par exemple : elle est a partie au lieu de elle est partie). Les techniques des laboratoires s’améliorent sans cesse et les progrès réalisés depuis deux ans sont déjà grands. La qualité des sous-titres a donc encore une bonne marge de progression.

L’une des questions les plus importantes qui se pose aux chaînes et aux utilisateurs du sous-titrage dans les mois qui viennent est la suivante : est-il préférable de respecter la langue écrite dans sa forme, ou de donner à tous l’accès aux mêmes informations ?

Propos recueillis par Medias-soustitres auprès d’un professionnel du sous-titrage.

3 Commentaires

  • LE FALHER
    5 novembre 2009

    je suis sourde, Pour les sous-titrages,( avec ma famille entendante qui regarde aussi !) nous trouvons le procédé de « TF1 » très proche
    du langage . Par contre : la forme est trop « flashée », le sous titre est trop rapide, je n’ai pas le temps de lire ? donc je change de chaine ....je vais sur france 2 le S-T est plus agréable mais trop décalé et surchargé à l’écran... il doit être possible de règler ce temps de « flash » sur le modèle de TF1.
    Sinon pour les autres chaines le S-T est très décalé, c’est évident ...( c’est mieux que rien !) Un forum m’interesserait ...Merci à votre équipe

  • Serkof
    6 novembre 2009

    L’effet pervers du sous-titrage en direct c’est que c’est la solution de facilité et on l’utilise même pour le différé. Par exemple, l’émission « On n’est pas couché » diffusée en différé comporte des sous-titrages très décalés par rapport aux paroles prononcées. Personnellement je suis incapable de resynchroniser mentalement les paroles lues et les images. Ce genre de sous-titrage est inutile pour moi (malentendant et non sourd profond).

    Dans le cas du vrai direct, je crois qu’un sous-titrage avec de nombreuses fautes est un moindre mal par rapport à un sous-titrage exact mais décalé. Je pense même que l’on pourrait délibérément adopter une orthographe simplifiée si ça augmente la vitesse d’affichage. Le but est d’être compris et non de satisfaire les puristes.

  • Manu M
    23 novembre 2009

    Et si les chaînes diffusaient leurs émissions en léger différé (de 30s à 1 minute) ?
    L’équipage de sous-titrage reçoit l’image et les discours en vrai direct et pourrait envoyer au bon moment des sous-titres corrigés sans décalage pour le téléspectateur.

    Après tout, avec la technologie du numérique, les téléspectateurs ne voient de toute façon plus rien en vrai direct (il y a toujours un décalage de 3 ou 4 secondes : on peut s’en apercevoir quand on reçoit la télé en analogique et en numérique ou bien quand on écoute un match de foot à la radio où les commentaires sont en avance par rapport à la diffusion télé numérique).



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